La rue j'connais... [With Nakou]

J'avais réussi a échapper a la surveillance de Lady et de Jim lors de la promenade.
Me dandinant en lançant des regards charmeurs aux jolis minettes qui passaient, tout en zigzaguant entre les voitures, je n'avais pas remarqué qu'un mec de la fourrière me pistait.En lançant un regard rapide derrière, j'élaborais rapidement un plan.
Donc, cet attrapeur de chiens me suivait toujours, au moment ou je traversais la route.Il plissa les yeux et me suivit.Sautant de voiture en voiture, me dandinant toujours, je commençais a courir ventre-a-terre direction un coin calme de la rue.
Une fois l'homme de la fourrière semé, je partis en un petit rire.

«-Hé hé hé, quelle cruche celui-là.Même pas capable d'attraper le cabot le plus cool des rues.» me disais je en continuant a me dandiner.
Après réflexion, je n'ai jamais été attrapé par ces idiots.La rue, je la connaissais.Il fallait du savoir faire tout de même, j'étais de la génération de la rue, alors no soucis.
Je m'étais retrouvé dans un quartier un peu délabré, pas une voiture a l'horizon, ni un chien.Ni rien du tout même.Sur le coup, j'ai commencé a me demander ou j'étais...Mais peu importe, ce n'était qu'une rue, non ?Et le légendaire Clochard que j'étais connaissais bien les rues.
«-Mais pourquoi m'en faire ?La rue j'connais, héhé...Woohoo Hoo Hoo Hoo...» dis-je.

A ce moment, je trébuchai sur quelque chose et m'écrasais pitoyablement sur le sol.Et puis, toujours a me dandiner, ça devait me servir de leçon.Je me retournais pour voir ce qui m'avait fait trébuché et j'écarquillais les yeux, c'était... un corps ?
Je donnais un coup de patte rapide a cette chose et reculai de quelques pas.C'était très étrange tout ça...

Tout ce dont il se souvenait, c'est qu'il avait sombré dans un profond sommeil. Peut-être trop profond même. Ses yeux ne parvenaient plus à s'ouvrir alors qu'une crainte naissait et se cramponnait dans son estomac. Un froid le submergeait, humide, comme s'il était intégralement aspiré par l'océan qui bordait leur île. Il sentait ses pattes impuissantes face aux vagues. Plus il tentait de remonter, plus le large l'entrainait, s'employait à le faire sombrer vers le fond. Puis, alors qu'il était balloté sans parvenir à comprendre comment il parvenait à rester en vie, il se retrouva sur un sol qu'il n'avait encore jamais rencontré - bien plus dur que la terre, sans aucune particule de sable, ni même aussi froid que la glace. Diego ne le savait pas, mais il était arrivé sur du béton. L'eau derrière lui semblait beaucoup plus sale que celle qui l'avait malmené. Peut-être était-elle également moins violente, puisqu'elle lui avait permis de regagner un semblant de... terre. Toussant pour recracher ce qu'il avait avalé d'eau, il resta gisant au sol quelques bonnes minutes, récupérant de cette horrible arrivée. Etait-il arrivé dans un autre monde, à nouveau? Rêvait-il simplement? La deuxième option lui paraissait plus réelle cette fois, bien qu'il avait toujours espéré que ce soit la bonne. Parcouru d'un frisson, le smilodon se fit violence pour rassembler ses forces et se relever. Face à lui, d'énormes bâtiments se dressaient vers le ciel. Un tumulte qu'il n'avait jamais rencontré lui parvint également aux oreilles. Quels étranges animaux pouvaient créer des choses aussi laides, délaissant la nature, et provoquer pareil brouhaha? Grimaçant, le smilodon hésita à s'aventurer dans cet endroit qui ne lui inspirait aucune confiance. C'est à peine si quelques arbres naissaient de part et d'autres dans ce monde de pierres brutes, et le froid auquel il était habitué n'était absolument pas présent. S'il n'avait pas été si trempé, il aurait peut-être même eu trop chaud ici. Mais il ne pouvait décemment pas rester ici sans bouger. Malgré l'odeur de la pollution, la chaleur et le bruit, le courageux tigre à dents de sabre s'avança donc vers les premiers gratte-ciel qu'il apercevait.

Quelle idée ce fut!

A peine eut-il fait quelques pas dans une ruelle qu'une calèche passa devant lui, manquant de le bousculer au passage. Bien entendu, le conducteur s'en serait bien plus mal sorti que Diego, bien imposant pour sa machine, mais cela n'empêcha pas le smilodon d'avoir un mouvement de recul, les oreilles en feu. Quel horrible monde! En restant à l'angle de la rue, il put apercevoir une quantité d'étranges ... créatures? passer sur la route. Très nombreuses, elles ne semblaient pas migrer vers le même endroit mais plutôt aller de chaque sens du chemin. Diego les observa un moment sans comprendre. Qu'est ce que ça pouvait bien être...? Alors qu'il plissait les yeux d'incompréhension, un cri le tira de ses réflexions. Sursautant, il put apercevoir une humaine le pointer du doigt. Elle ne ressemblait clairement pas à Roshan! Elle ne portait pas les mêmes habits, semblait marcher sur un pic, avait les yeux masqués par de drôles de pierres et dégageait une odeur qui n'était absolument pas naturelle. Diego eut un mouvement de recul. Elle avait peur de lui. Sur le coup, il ne sut trop quoi faire: gronder pour la faire définitivement partir, ou fuir lui-même. Mais de nombreuses autres créatures étranges apparurent, il put voir un flash l'aveugler, entendre une grosse créature s'arrêter, d'où sortirent d'autres humains, et il n'en fallut pas plus: il fit volt face et détala. Le coeur battant, le smilodon se dit qu'il était définitivement tombé dans le pire des mondes qu'il pouvait! La chaleur commençait à l'étouffer, aussi, dans sa course, il tâcha bien de rester le plus à l'ombre des buildings possible. Il semblait avoir distancé les bestioles bruyantes lorsque ses pattes ne le maintinrent plus. Totalement perdu et assommé par la chaleur, le félin se laissa choir dans la rue déserte, près d'un couple de poubelles. C'est alors qu'un animal, visiblement canidé sans pour autant être un loup, trébucha sur lui, se rétamant non loin. Il se releva et vint donner un coup de patte au félin sur le sol qui aurait volontiers répliqué en grondant s'il n'avait pas tant eu besoin d'une aide. Diego se redressa alors, tremblant, observant l'inconnu.

-Où sommes-nous ici?

Demanda-t-il simplement, le ton las, détaché, mais épuisé. Il espérait sincèrement rentrer rapidement chez lui, ce monde ne lui disait rien qui n'aille...

Spoiler:

La chose sur qui j'avais trébuché se releva faiblement.C'était un très grand chat, avec de longs crocs.Je n'avais jamais vu cela de ma vie.Son poil était d'un orangé flamboyant, qui m'aurait donné mal aux yeux si je n'étais pas curieux de savoir de quelle espèce il était.
Je m'approchais a petit pas et fit le tour de cette étrange créature.Il était sale, très sale.Des traces de sang brillait au cotés de ses pattes et de son museau.Il semblait mal a l'aise dans cette ville.Je trottinais donc jusqu’à une bouche d'incendie et déboucha le coin d'un coup de patte.Un jet d'eau fusa a la seconde vers le gros matou, qui fut aspergé de la tête au pied.Je fis moi aussi un tour dans l'eau, avec cette chaleur étouffante, ça faisait du bien.
Une fois cela de fais.Je me rapprochais du gros matou.

-Nous sommes dans une petite ville américaine. lui dis-je.

Il ne semblait pas prêt a comprendre ce gars là.J'avais l'impression qu'il venait d'un autre monde, d'un autre univers.Je roulais les yeux d'un air blasé, et sautant de poubelles en barrière, j'arrivais rapidement près d'une affiche pour dentifrice, où il était écrit noir sur bleu :

"Le meilleur dentifrice de Londres !"

J'aboyais un bon coup pour retenir son attention sur l'affiche.Mais, savait-il lire ?Je descendais de mon promontoire de fortune et me rassit devant lui.

-Nous sommes a Londres.Et je sens un doux fumet de saucisse dans le coin.Tu as faim ? lui proposais-je.

Il ne bougea pas.Toujours trempé, il ne faisait que me regarder.Il venait vraiment d'une autre planète celui-là.Mais bon, je me mit a renifler et a regarder les environs.Il y avait un vendeur de Hot Dog ambulant a 15 mètres je dirais.Ce devait encore être ce cher Wetver, un petit gros pas très social.Il était très cher au niveau de ses prix, et grondait sur tout le monde, mais il était simple a berner, et n'était jamais en rupture de saucisse.Je me mis au coin de la rue et attendit ce vieux Wetver.A peine eut il passer le coin, en clamant "Hot Dog chaud !" que j'aboyais et sautait sur son chariot.Je fourra la tête dans le bac a saucisse, en sortit une bonne ration et courut jusqu'a l'endroit où était le gros matou.Je lui donnais un coup de museau pour le cacher entre les barres de bois et lui dit en déposant les saucisses a côté de lui :

-Attends moi là, le vieux vendeur de Hot Dog me course, je vais lui faire faire un marathon, et je reviens.Mange si tu veux.

Je ne savais pas si il avait compris, mais je me mis a courir vers le centre de la ville, Wetver sur mes talons.

Avant même de lui répondre, l'étrange canidé pris des initiatives qu'il n'avait ni demandé ni pu prévoir. D'un coup, il reçu un jet d'eau qui manqua de lui faire faire un bond en arrière, mais le contact de l'eau lui fit finalement plus de bien qu'autre chose. Si certes le geste avait été surprenant et qu'il avait toujours craint ce liquide qui venait de sortir de nul part, il ne pouvait nier souffrir de la chaleur de ce monde auquel il n'était pas habitué. L'air était clairement malsain ici. Comment pouvait-on vivre dans un endroit aussi bruyant et... étrange?

Le chien lui répondit qu'il se trouvait dans une ville. Diego, encore sonné de son arrivée, le regarda faiblement sans trop comprendre. Une ville? Mais qu'est ce que ça pouvait bien être? Il n'avait jamais rien entendu de pareil. Le chien sauta alors près d'un chose sur laquelle il ne pouvait guère poser de nom, l'incitant d'un aboiement à l'observer comme s'il s'agissait là d'une preuve évidente à son discours. Puis il revint vers lui et donna légèrement plus de détails avant de lui proposer à manger. Le smilodon n'avait pas franchement envie de casser la croûte, mais plutôt de repartir très vite chez lui. Sans attendre de réponse, l'inconnu reparti chercher visiblement à manger. Diego se pencha pour voir ce qu'il faisait, un peu surpris de l'hyperactivité de ce qui semblait être son hôte en ce monde. D'un bond, le canidé avait bondit et dérobé la nourriture d'un autre. Un peu surpris, Diego se redressa, et eut à peine le temps d'entrouvrir la gueule pour l'interroger que l'inconnu le pousser dans une cachette, lui offrant son précieux butin et expliquant qu'il allait distancer la créature qui semblait vaguement descendre de l'humain. Repartant au pas de course, il put constater que celui qui venait de perdre son repas s'était aventuré dans la ruelle déserte pour courser le voleur. Diego voulut sortir de son abri pour rugir et débarrasser ce qui semblait vouloir être son allié de son poursuivant, mais il sentit qu'il n'avait pas franchement la forme ici - il fallait qu'il s'habitue à cet énorme changement de climat. Il jeta un bref regard à la viande, et put noter qu'elle n'avait rien de bien naturel. Il n'avait jamais vu de proie de cette forme. La détaillant d'un regard incertain, il se releva finalement et observa les alentours. Ce qu'il avait qualifié de ville, et plus précisément de "Londres" semblait être côtoyé par des milliers d'humains. Étaient-ils à l'origine de tous ces nids immenses au toucher de pierre? Il fallait vraiment qu'il interroge le chien sur tout ceci. Même si l'inconnu n'avait pas l'air des plus patients, il l'avait aidé à récupérer du poil de la bête. L'eau l'avait remis d'aplomb et, jetant de nouveau un regard à la nourriture de ce monde, il se risqua à en goûter une, et put constater qu'il s'agissait bel et bien de viande. Tellement étrange... Il n'en mangea pas davantage, n'ayant pas réellement faim avec tous ces événements, et ne voulant pas priver le chien de son repas non plus.

Le canidé revint finalement, fier d'avoir semé le pauvre détroussé. Diego l'accueilli avec un sourire, néanmoins l'oeil fatigué.

-Si je comprends bien, ce sont les hommes qui ont construit cet endroit? Il semblait si peu... imposants dans mon monde.

Il ne voyait absolument pas Roshan construire des choses aussi grandes. Leurs tipis et habits fais en peaux de tigres à dents de sabre étaient bien loin de l'accoutrement de l'humaine de tout à l'heure et des immenses montagnes non-naturelles qui leur faisait face. Il semblait également que ce que lui avait indiqué l'étranger était absolument inutile.

-Et qu'es-tu exactement?

Se redressant un peu, sa carrure peinant à ne pas bousculer ce qui l'avait masqué jusque là des yeux de l'être humain en colère, il sourit à l'inconnu et se présenta finalement, posant clairement les choses:

-Je m'appelle Diego. Et je ne viens pas de ce monde.