Ce monde n'est pas le nôtre (Aniu - Vitani (ouvert à tous))

Vitani et Aniu marchaient depuis un petit moment; la lionne étant dans son élément, elle marchait d'un pas souple et assuré, la tête bien droite, très confiante. Trop, sans doute.

Car soudain, elle sentit une odeur inconnue, entendit du bruit, sentit des vibrations sous ses pattes... Qu'est-ce qui pouvait se déplacer avec si peu de discrétion? Même quand elle marchait sans y faire attention, Vitani n'était pas si bruyante, dans tous les sens du terme.

Elle vit finalement des bêtes ressemblant vaguement à des antilopes, mais sans cornes, et de longs poils sur leur cou, ainsi qu'à la place de la queue... Et sur leur dos... D'autres bêtes, qui ne disaient rien à Vitani. Déjà stupéfaite de voir que ces animaux montaient les sortes d'antilopes, elle nota d'autres choses étranges: leur fourrure était disparate. Ainsi, par endroits, ils n'avaient même pas de fourrure, comme sur le visage par exemple! Par endroits elle était apparemment courte, et surtout... bleue?! Oui, bleu foncé! Mais était-ce vraiment de la fourrure? Par contre, ils avaient ce qui ressemblait vraiment à une fourrure courte sur le haut de la tête...
Fascinée par ces inconnus, si différents de tout ce qu'elle connaissait, Vitani ne pensa même pas à s'enfuir en les voyant arriver rapidement, montés sur les espèces d'antilopes.

En se tournant vers la louve blanche, elle vit son expression d'horreur, et le lien se fit soudain dans l'esprit de la lionne. Des humains! Bien sur, comment n'avait-elle pu y penser qu'à cet instant! Ces humains, qu'Aniu décrivait si dangereux, si cruels, si sournois...

-Il nous faut fuir d'ici!! Ils sont beaucoup trop nombreux pour qu'on puisse se risquer à les affronter!!

Vitani n'hésita pas une seconde, elle fonça vers les arbres les plus proches. Il leur fallait un endroit où se cacher, et vite!
Elle donna toute la puissance de ses pattes, affolée, l'adrénaline lui permettant de repousser ses limites au maximum.

Elle s'approchait des arbres... Elle allait pouvoir s'y cacher... Mais les humains semblaient les avoir vus, puisqu'elle entendit des cris, une cavalcade, non loin.
Ils les poursuivaient!!

Aniu courrait comme jamais elle ne l'avait fait auparavant. Ses craintes étaient justifiés. Elle qui se demandait quel intérêt pouvaient avoir les hommes à dresser ces imposants quadrupèdes, sa question trouva très vite une réponse qui ne la rassura en rien: ils étaient maintenant beaucoup plus rapides, et disposés à faire des courses plus longues sans vraiment s'épuiser. Leur ingéniosité de même que leur sournoiserie ne se posait vraiment aucune limite!!

Malgré le fait que la louve et la lionne prirent les initiatives en s'enfuyant, elles se firent toutes les deux remarquer. Mais ce n'était pas si difficile de les débusquer, comme elles ne faisaient pas parties de ce monde, elles n'y étaient pas convenablement adpatées, et ne pouvait pas se cacher. Et de telles créatures ne devaient pas être très nombreuses dans le coin. Les louves blanches surement, mais pas avec un pelage aussi touffu. Quand aux lionnes...

Une course poursuite éffrenée vit se dérouler non loin du chemin de fer. Les chevaux couvraient rapidement l'écart, ils étaient plus vifs et plus endurants. Aniu ne se sentait pas loin de flancher. La chaleur combinée à un effort physique intense, c'en était trop pour elle. Affaiblie, elle trébucha sur un gros caillou, et glissa sur le sol aride sur quelques mètres. Les hommes se rapprochaient toujours de plus en plus, et elle était légèrement groggy. Ses esprits peinaient à lui revenir... Mais le grondement brutal des sabots foulant le sol se chargèrent de la faire revenir à la raison. Sauf qu'elle venait d'accumuler un sérieux retard, qu'elle ne pourrait jamais rattraper!! Elle allait se faire avoir si elle ne réagissait pas très vite! Devrait-elle combattre? En tout cas, elle comptait vendre chèrement sa peau! Pas question de se rendre aux humains sans leur faire payer le prix cher!!

Absolument terrifiée, Vitani courait sans se soucier de la douleur de ses pattes sur le sol si sec, tenant à peine compte de son coeur qui battait à tout rompre, de sa respiration rauque. Tout ce qu'elle savait, c'était qu'en ralentissant ou s'arrêtant elle était perdue. Il fallait courir, toujours courir!
Mais une fois arrivée aux arbres, que faire? Elle aurait bien du mal à se cacher, dans un endroit où elle ne connaissait rien, ni les cachettes ni les dangers - ce n'était pas parce qu'elle vivait dans un monde aux températures assez semblables que tout était identique, malheureusement... - , et Aniu encore plus, avec sa fourrure blanche.
Ah ça, c'était une belle fourrure; belle, mais aussi très visible!

Vitani entendait que les quadrupèdes derrière elle se rapprochaient, et une nouvelle vague de terreur la traversa, si intense qu'elle faillit se laisser tomber au sol, en constatant qu'ils étaient bien trop rapides.

Quelle honte! Elle, une chasseuse, prédatrice redoutée dans son monde d'origine, en haut de la chaîne alimentaire, se faire pourchasser comme un vulgaire lapin!

Mais un bruit incongru derrière elle attira l'attention de la lionne. Elle prit la peine de se retourner, pressentant quelque chose d'anormal, et vit qu'Aniu avait glissé et était tombée.
Et les humains qui étaient toujours plus près... Vitani était déchirée. Que faire? Si elle partait, peut-être que les humains s'arrêteraient pour s'occuper de la louve, et elle prendrait de l'avance. Mais non seulement il ne fallait pas compter là-dessus - ils étaient nombreux, une partie pouvait rester auprès d'Aniu pendant que le reste continuerait la battue de la lionne, de plus elle n'avait pas vraiment envie de laisser sa compagne comme ça.
Sans aucun doute, elle se relèverait, mais elle aurait sans doute perdu trop de temps, et déjà les humains seraient là... Et Vitani ne pouvait s'imaginer fuyant, abandonnant Aniu à son sort. Cela lui aurait donné l'impression d'une traîtrise, elle s'en voudrait sûrement pendant très longtemps.

Toutes ces réflexions traversèrent en un éclair l'esprit de la lionne, et sans plus réfléchir, elle retourna en arrière et, d'un bond, fut auprès de la louve; à petits coups de museau pressants, elle la poussait à se relever.
La hâte la faisait trembler, il lui semblait qu'une petite voix intérieure lui répétait sans cesse "dépêche-toi, dépêche-toi...", la rendant plus nerveuse encore.
Et toujours, toujours les hommes approchaient plus, malgré l'impression de Vitani que le temps était ralenti...

La confrontation relevait du suicide, Aniu ne pouvait pas s'opposer à tant d'humains à la fois! Surtout pas montés sur des êtres aussi imposants et rapides! Si elle se mettait sur leur passage, nul doute qu'elle se retrouverait percutée par ces masses de chairs lancées à toute allure. C'était comme une horde de caribous qui s'enfuyait vers elle, mais en beaucoup plus dangereux cette fois. En fait, on ne pouvait faire aucune comparaison, car les humains ne montaient pas les caribous, ça se saurait..

Mais il était trop tard pour ce genre de réflexion! Elle aurait tout le temps de s'y livrer une fois qu'elle se serait sortie de ce pétrin. Tout d'abord, tenter de reprendre le terrain que la louve avait perdu. C'est pourquoi sa course reprit, alors que les humains étaient toujours derrière elle, à à peine une vingtaine de mètres. En jetant un rapide coup d'oeil derrière elle, Aniu vit un des hommes saisir une longue tige de métal et de bois: un fusil. Sa, elle connaissait bien. Mais elle se demandait si Vitani avait conscience de la gravité de la menace. Sachant qu'elle n'avait autrefois jamais fait face aux humains, elle ne devait pas se douter des moyens qu'ils possédaient pour chasser.

_Fais attention à toi!! Il faut qu'on se disperse!!! La louve commença à se détourner, empruntant une direction différente. Comme elle l'avait prévue, une partie du groupe se mit à la suivre. Maintenant que les effectifs des poursuivants étaient divisé, ne restait plus qu'à trouver une solution pour les semer et rejoindre la lionne.

°j'espère de tout coeur que tu vas t'en sortir petite. Je ne te souhaite pas de tomber entre leurs mains...° pensa t-elle.

Mais désormais, elles devaient s'en sortir chacun de leur côté. Si Aniu réussissait à se débarrasser de son groupe, elle se jura de venir porter secours à la lionne. Mais elle n'avait pas trouvée de meilleure solution. Se diviser pour mieux régner. Cette technique marchait en Alaska, mais marcherait-elle ici?...

Le bruit de la cavalcade des quadrupèdes chevauchés par les humains se coordonnait incroyablement bien avec les battements désordonnés de son coeur, à sa respiration rauque... De la même manière que de l'eau très chaude en paraît presque froide, sa terreur était telle qu'elle ne la sentait presque plus, comme si elle était engourdie.

Et enfin Aniu fut de nouveau debout, et elle repartit à toute vitesse. Toujours dans une étrange torpeur, la lionne la suivit.
Un grand bruit non loin d'elle la réveilla d'un coup. D'où venait ce son, si brusque, qui lui avait claqué aux oreilles? En regardant vivement dans son dos, elle entr'aperçut que les hommes avaient des choses longues et fines dans les mains - bien qu'ils aient déjà des sortes de lianes, aussi accrochées à la tête de leurs bêtes - et qu'ils les pointaient sur elles.

L'affolement l'étreignit de nouveau, comprenant qu'elle risquait à tout moment de mourir. C'était étrange, elle avait eu peur quand les hommes les avaient prises en chasse, bien entendu, mais elle n'avait pas saisi toute l'étendue de leur dangerosité, comme si ce n'était qu'un jeu qu'elle pouvait décider d'arrêter à tout moment.

Mais la vérité venait de la rattraper. Nul jeu, nulle ami avec qui elle le jouait.
Cela n'avait rien des ébats de jeunes lionceaux, feignant la bagarre. C'était la vie réelle, elle était réellement en danger de mort.
Et jamais elle ne s'était sentie si vulnérable. Même pendant la guerre contre Simba, elle se battait, franchissait les frontières pour ses missions d'espionnage avec aisance, avec insouciance, comme si rien ne pouvait lui arriver.
Mais elle n'était pas chez elle, elle était perdue dans un autre monde, où elle ne connaissait personne - à part une louve encore plus perdue qu'elle.

-Fais attention à toi!! Il faut qu'on se disperse!!!

Quoi, comment? Le cri d'Aniu retentit, et, aussitôt après, elle obliqua dans une autre direction. Vitani ralentit légèrement de manière involontaire, désorientée, avant de se rappeler les humains derrière elle.
Car si une partie du groupe était partie à la suite de la louve, l'autre restait accrochée à la jeune lionne comme des sangsues, fermement décidés à... A quoi? A la tuer? A la capturer? Elle n'en savait rien. Et au final, elle s'en fichait. Tout ce qu'elle savait, c'était qu'elle ne devait surtout pas se faire attraper...

Elle courut donc, du plus vite qu'elle pouvait, prenant la direction opposée à celle d'Aniu, fouillant le paysage à la recherche d'une cachette.

Une sorte d'espoir la prit: peut-être qu'elle réussirait à changer de monde, tout en retrouvant bien vite son bon sens. Elle ne savait pas comment ça marchait, elle ne pouvait pas le contrôler. Et ses chances de changer de monde étaient infimes...
Prise de désespoir, à peine un minuscule espoir de survie dans le coeur, elle entra dans un bois, espérant trouver de quoi se cacher...

Elle n'avait pas peur.

Ah ça non, pas question de céder à la panique dans un cas aussi ardu que celui qu'elle vivait actuellement. Des courses poursuites, Aniu en avait vécue des tonnes. A la différence près que souvent, elle se trouvait face à des humains en traîneaux. Et les créatures que chevauchaient ces hommes étaient plus maniables et rapides que les attelages de bois. La tâche de s'en débarrasser serait ardue, mais tout de même réalisable pour autant.

Encore fallait-il faire marcher ses méninges plutôt que de courir, car elle savait qu'à maintenir cette allure, la louve se retrouverait fatiguée en un rien de temps. Elle avait beaucoup moins d'endurance sur un terrain comme celui-ci, sans neige, avec seulement des cailloux et un sol chaud lui martyrisant les coussinets. Son temps était compté, elle n'avait pas le droit à l'erreur. Quitte ou double.

Tout d'abord, trouver un endroit où elle pourrait se mettre à couvert, et éventuellement, se soustraire à la vue de ses poursuivants. Mais une louve blanche dans un environnement tel que celui-ci, aller se cacher... Si la situation s'y était prêtée, elle en aurait rigolé.

Premier coup de feu des hommes, premier coup de sang pour la louve. Au moins, vu comment ils étaient ballotés sur leurs destriers, ils ne pouvaient pas viser correctement, c'était toujours ça de gagné. Ne pas trop espérer quand même, ils devaient bien connaître ces lieux, et la rabattre tout droit vers un piège où il y avait des complices n'attendant que de les voir arriver pour refermer les filets sur la louve. Mais pas question de se faire avoir par une méthode de chasse aussi grossière, elle n'était pas bête. Au lieu de suivre une direction prédeterminée, la louve entama toute une série de zigzagues en bondissant tantôt d'un côté, tantôt de l'autre. Puis, se rabattant brusquement sur la gauche, elle déstabilisa un des chevaux qui, surpris par la manoeuvre, s'étala dans la poussière. Et un de moins!!

Restait 4 autres cavaliers qui semblaient avides d'en découdre en voyant l'un de leur camarade mordre la poussière! Ils dégainèrent chacun une arme à feu, et tirèrent chacun leur tour. Déboussolée par toutes ces balles (elle n'était pas habituée à subir de telles rafales), Aniu dut revoir son plan. Elle ne pouvait plus s'approcher d'eux sans se faire toucher, et loin d'elle l'idée de vouloir finir ainsi, truffée de plomb.

Un nouveau changement de direction l'amena vers un semblant de forêt distinguable au loin. Parfait! Au moins serait elle dans son élément! Restait à l'atteindre, et les coups de feu se faisaient toujours aussi serrés...

°Allez!!! Tiens le coup!!!° se criait-elle mentalement pour se donner du courage.

Elle courut, courut, courut sans s'arrêter. Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle allait faire.
Vitani sentait le désespoir lui glacer le coeur et lui faire monter les larmes aux yeux.
Elle sentait ses forces disparaître peu à peu, tandis que les bêtes derrière elle semblaient n'avoir aucun mal à soutenir l'allure. Ces saletés étaient endurantes, en plus d'être rapides!
Dans ce cas, pourquoi s'être laissées dominer ainsi par les humains? Question dont la réponse importait bien peu en cet instant, et la lionne se demanda une seconde pourquoi elle pensait à une chose si futile en un moment pareil.

Un nouveau bruit assourdissant derrière elle. Heureusement, quel qu'ait été le but de ces humains, il n'avait sans doute pas été atteint.
Vitani essaya encore d'accélérer, mais elle jugea qu'elle n'en aurait plus pour longtemps si elle ne pouvait pas se mettre en sûreté dans les minutes qui allaient suivre.

Elle zigzaguait entre les troncs d'arbres et les buissons, sautait par dessus les rochers, et enfin trouva une possibilité d'échappatoire.
En effet, elle avait aperçu un buisson assez gros, un peu plus loin.
Mais si elle y plongeait directement, les humains sauraient qu'elle s'y était réfugiée. Finalement, elle fit un crochet, prenant une autre direction, et elle accéléra, puisant dans ses toutes dernières ressources.
Elle pria intérieurement pour que les hommes ne la voient pas revenir jusqu'au buisson.

Elle y était! Elle fonça dedans. Elle n'avait pas repéré que ses branches étaient couvertes d'épines, mais elle n'en avait cure. Tant pis pour les ronces qui agrippaient sa fourrure, l'obligeant à l'arracher quand elle tentait de pénétrer plus profondément dans ce refuge incertain.

Elle fit du plus vite qu'elle put, tout en tentant de ne pas laisser de touffes de poils accrochés, bien visibles, sur les épines.
Une fois qu'elle pensa être "en sûreté", elle se tapit au sol en se forçant à respirer doucement, exercice difficile alors qu'elle venait de faire une course effrénée.

Mais soudain lui parvinrent les bruits de sabots de ses poursuivants, mais plus lents. Bonne nouvelle; ils ne savaient sans doute pas où elle était, ils tentaient de retrouver sa trace.
Elle retint sa respiration, terrifiée à l'idée qu'ils la trouvent.

"Allez, allez... Partez..." leur intima la lionne, espérant de tout cœur que ni eux ni leurs bêtes n'avaient un odorat assez développé pour la trouver.

Finalement, les bruits de pas s'éloignèrent lentement. Vitani n'osait pas bouger le moindre muscle.
Elle resta immobile pendant ce qui lui sembla une éternité, tendant tous ses sens pour vérifier qu'ils étaient partis.
Là, elle laissa dériver ses pensées, et fut rattrapée par son angoisse pour Aniu, ce qui l'étonna: depuis quand se préoccupait-elle autant des autres?
Dans tous les cas, elle souhaitait que la louve blanche soit saine et sauve. Et d'ailleurs, comment la retrouver?
Elle morte de peur, n'avait pas le courage de sortir de sa cachette. Mais il allait bien falloir que ça arrive, il lui faudrait aller trouver à manger à un moment ou à un autre.
Ce fut seulement à ces instant qu'elle se rendit compte de la faim qui lui tenaillait le ventre. Pas moyen de faire autrement, elle devait quitter ce buisson.

Du plus prudemment qu'elle put, elle sortit, lentement, doucement, flairant et écoutant de tous les côtés, prête à fuir au moindre bruit inhabituel, au moindre signe de présence des humains.
Elle s'arma de courage. Elle devait y aller.

Encore juste une centaine de mètres qui sonneraient son salut! La liberté et le soulagement de la traque à portée de patte, et pourtant si dur à atteindre! Mais surtout ne pas se décourager, se donner jusqu'au bout! Tout le temps lui serait donné de se reposer, mais pas tout de suite.

Une balle lui érafla l'épaule, la faisant émettre un petit couinement, mais plus de surprise que de douleur. La blessure était superficielle, mais les dégâts mentaux étaient bien plus importants. La rage de se battre et de faire couler le sang par esprit de vengeance devenait incontrôlable. Sa faim de chair à dévorer pour se soulager devenait insatiable également. Les pulsions sauvages tentèrent de reprendre le dessus sur la louve et lui faire comprendre qu'elle était une prédateur, et que par conséquent, elle devait tuer pour se défendre et pour vivre.

Pas question de sombrer dans un quelconque mutisme pour Aniu!! Depuis suffisamment longtemps elle arrivait à reprendre une vie normale sans être affectée par son aspect sauvage, et elle comptait bien continuer comme ça!! Que les humains continuent! Tôt ou tard, ils se retrouveraient de nouveau face a face, et ce jour là, les crocs feront la différence!

Galvanisée, Aniu ralentit le pas en n'entendant plus que le bruit déjà assez tonitruant des sabots sur la roche dure et misérable. Les coups de feu avaient cessé, les hommes tentaient de recharger comme ils le pouvaient sur le dos de leur canassons, sans grande réussite. se dit-elle. Une nouvelle occasion inesperée de contre attaquer venait de lui être offerte! Alors autant la saisir dès maintenant!

Un des 4 cavaliers restant fit accélérer sa monture et dégaina un lasso pour tenter d'en finir. Sauf que son erreur lui coûta cher, car Aniu, même en étant fatiguée, restait une louve!! Une créature comptant parmi les plus féroces prédateurs, avec une réputation tout à fait fondée! Le cow-boy réalisa son erreur seulement après s'être fait désarçonné par une grande masse blanche poilue, et alla rouler dans la poussière. Un de plus!

Les autres, en voyant à quel point leur proie était redoutable, renonçèrent dès que le semblant de forêt fut atteint. Continuer ne servait plus à rien, ça n'en valait plus la peine vut ce que la traque leur avait déjà coûté en terme d'hommes et de matériel. Dépités, les cavaliers repartirent au trot aider leurs comparses, sous le regard perçant de la louve gardienne blanche ne les perdant pas de vue jusqu'à ce qu'ils ne forment plus qu'une tâche sur l'horizon. Elle venait de prouver sa supériorité tactique sur des humains venant d'un autre monde, elle était fière d'elle. Comme pour le prouver, elle hurla dans le ciel sa victoire.

_AOOOOOOOOUUUUUUUUUUUH

Alors qu'elle flairait l'air environnant à la recherche de sa compagne de voyage, un puissant hurlement la surprit. C'était comme un long chant, exprimant le triomphe.

Sans savoir d'où lui venait cette certitude, Vitani sut alors que c'était Aniu qui "chantait" ainsi. Elle était saine et sauve, c'était sûr!

Elle se mit alors à trotter à longues foulées souples, se forçant toutefois à garder toute sa vigilance: si les humains qui harcelaient la louve blanche l'avaient manifestement lâchée, il n'en était peut-être rien de ceux qui l'avaient cherchée elle.
Cependant, son instinct lui soufflait qu'elle n'avait rien à craindre.
Elle sentait monter en elle une vague de sentiments mêlés, joie, fierté, triomphe aussi.

Elle accéléra encore l'allure, grisée par ces sensations. Mais elle devait rester prudente, ou bien elle risquerait de se mettre en danger, et peut-être même d'une façon qui ne lui serait jamais venue à l'idée - une façon très stupide.

Elle sentait de plus en plus fort l'odeur d'Aniu: elle était toute proche.
Elle aperçut fugitivement la fourrure blanche qui la caractérisait, et soudain redevint très calme. Elle ralentit, jusqu'à marcher, et se fit discrète.
Prudence, se dit-elle. Après tout, si les humains étaient tels que la louve les lui avait décrits, ils pouvaient être revenus sur leurs pas...

Elle s'approcha lentement, cherchant du regard une quelconque trace des hommes, ou une odeur particulièrement fraîche, un bruit inhabituel pour un petit bois comme celui-ci. Rien.

Elle sortit des buissons qui la dissimulaient visuellement et vit avec soulagement Aniu, en bon état, même si elle avait une blessure à l'épaule, manifestement sans gravité cependant.

-Tout va bien, Aniu? demanda-t-elle, bien que sachant déjà la réponse à la question, surtout grâce à son cri de victoire un peu plus tôt.

Une fois son hurlement achevé, Aniu toisa du regard la plaine qu'elle dominait de son petit promontoire. Tout était rouge aussi sûr que l'Alaska était blanc. Quel contraste entre les mondes... Quelles autres différences, aussi insignifiantes soient elles, pouvaient se trouver ailleurs? Sur de nouveaux univers? Toutefois, la curiosité est un vilain défaut, et on ne disait pas ce proverbe pour rien. La distance était de mise. Ne pas commencer à trop se lancer dans des quêtes vers l'inconnu, car les découvertes pouvaient se révéler aussi fructueuses en connaissances que dangereuses...

Bercée par le rythme doux et harmonieux du calme qui était revenu, Aniu entendit l'arrivée de Vitani, malgré la discrétion de celle-ci. Une chasseresse expérimentée comme la louve se devait d'être constamment à l'affut, car on ne savait jamais qui pouvait se trouver derrière soi. Seconde leçon, ne jamais tourner le dos a un arrivant, car les traîtres et les menteurs pouvaient se trouver n'importe oú. Elle se retourna donc après que la sempiternelle question "comment vas-tu?" lui fut posée. Il s'agissait bien de la lionne, en qui elle ne portait pas une confiance absolue, mais suffisante pour relâcher un tantinet sa méfiance.

_Pour ma part je me portes bien, merci de vous en soucier. Et vous?

Inconsciemment, elle s'était reprise à la vouvoyer. Vieille habitude de solitaire.

Sa légère blessure laissa échapper un mince filet de sang qui coagula le long de sa patte, tâchant le doux pelage hivernal de la louve polaire. Ce n'était pas grave, d'accord, mais ça saignait tout de même, ce qui posait un risque d'infection si elle ne nettoyait pas vite. Elle s'y attela en léchant sa plaie doucement, sans geste précipité. Pas de raisons de s'affoler, ce n'était que minime.

-Pour ma part je me porte bien, merci de vous en soucier. Et vous?

Vitani plissa légèrement les yeux, notant que la louve la vouvoyait de nouveau. Elle avait une étrange sensation, qu'elle ne pouvait - ou plutôt ne savait - pas définir.
Elle mit finalement la patte dessus: elle avait l'impression, en cet instant, qu'Aniu la regardait de haut, ce qu'elle n'appréciait guère.
Elle sentit l'exaspération pointer. Oh, ne pouvait-elle donc pas laisser une seconde de côté les minuscules coups portés à son amour-propre - qui peut-être n'existaient même pas, sortaient de son imagination - , surtout en un instant pareil?

-Oh, je vais bien, les humains ont visiblement laissé tomber ma traque quand ils ont perdu ma piste, bien que très proches de moi... Ils ne me semblent pas aussi malin que tu me les as décrits.

La lionne sentit la presque-accusation dans sa voix. Il lui semblait qu'elle avait été terrifiée, qu'elle avait paniquée pour presque rien!
Cependant, en voyant la louve lécher sa blessure à l'épaule, elle se rappela qu'ils avaient sans doute d'autres armes - elle ne savait pas précisément comment Aniu avait reçu cette éraflure, mais il y avait de fortes chances qu'elle vienne des hommes!
Peut-être l'une de leurs armes... Ils n'avaient pas semblé avoir de griffes quand Vitani les avait vus. Et d'ailleurs, il aurait fallu qu'ils rattrapent Aniu avant de l'attaquer avec des griffes ou des crocs...
Disposaient-ils d'une arme comme celle qu'elle avait vue dans leurs pattes quand ils les poursuivaient et qu'ils avaient pointé sur elles, mais qui causait des dégâts comme celui - moindre, heureusement - qu'on voyait sur l'épaule de la louve?

Vitani était assaillie de questions. Elle ne connaissait rien sur les hommes. Elle avait eu l'avantage comme l'inconvénient de ne jamais en avoir rencontré. La chance car elle avait vécu à assez paisiblement - aussi paisiblement qu'on le pouvait avec Zira comme mère et les Terres Interdites comme terrain de jeu et lieu de vie - , mais c'était un désavantage car elle ne savait pas quels étaient leurs points forts, leurs points faibles, ne savait donc pas comment leur échapper en mettant toutes les chances de son côté.
Elle était complètement démunie face à eux.

En cet instant, sa nostalgie de sa terre natale était si forte qu'elle aurait voulu se rouler en boule au sol et se mettre à pleurer, mais elle se ressaisit. Se lamenter ne servait à rien, ni à la mettre hors de portée des humains ni à la ramener chez elle. Elle devait continuer à se battre, surmonter les aléas que la vie lui imposait

Ainsi sa compagne d'infortune avait-elle réussie à leur échapper sans trop de dégâts. Mais il ne fallait pas pour autant que ça la mette en confiance.

_Si je puis me permettre, vous... Elle se racle la gorge. Désolé... Tu ne devrais pas les sous-estimer. Malins, ils ne le sont peut être pas, mais ils ont bien d'autres aptitudes que tu n'as pas pu voir. Mais ces hommes me semblaient arriérés par rapport à ceux que je "cotoyait" avant. A moins que ce soit à cause du mode de vie et de l'environnement... Enfin... Et oui, comme tu peux le constater, je suis blessée. Mais j'ai vu bien pire, rassures toi.

Pour lui confirmer qu'elle disait vraie, la louve laissa un léger sourire se former sur le coin de sa bouche. Un sourire confiant. Bien pire aurait pu arriver, il aurait suffit que l'homme qui avait réussi à l'atteindre l'ait visé un poil plus à droite, et il aurait touché en plein dans le corps, et Aniu n'aurait jamais pu s'en sortir. Comme quoi, tout ça ne tenait à pas grand chose. C'était angoissant de savoir à quel point une vie pouvait dépendre d'une simple milliseconde...

Au moins, elle s'en était sortit, et c'était l'essentiel. Ce n'est pas une simple chasse, même dans un autre monde, qui aurait raison de la louve! De toute façon, elle était trop têtue pour mourir. Et puis, son heure n'était pas prête de venir.

_Bon... Alors, on se le trouve ce point d'eau? Je suis encore plus assoiffée qu'avant!!

Et dire qu'avant elle avait un peu soif, cette fois, elle voulait boire comme si sa vie en dépendait! La course poursuite harassante l'avait presque tuée maintenant qu'elle était tranquillement posée. Son coeur battait à toute allure, ses muscles commencèrent à la brûler après tant d'efforts intenses. Surtout que maintenant, ils étaient vraiment perdus. Ne sachant où aller juste pour échapper aux hommes, elles s'étaient toutefois retrouvées dans ce semblant de forêt. Mais qui disait forêt disait obligatoirement rivière, ou ruisseau au minimum. Dumoins, Aniu l'espérait vivement.

Ne perdant pas de temps, la louve se mit en route malgré les petits élancements de sa blessure, la faisant légèrement boiter. Elle ne savait pas par où commencer, mais rester en mouvement était toujours mieux que d'attendre à rien faire en se tournant les pattes.

La louve expliqua qu'ils n'étaient peut-être pas très malins, mais qu'ils disposaient d'autres armes tout aussi redoutables, et qu'ils étaient "moins arriérés chez elle", pour reprendre sa propre expression.
Vitani renifla, un peu sceptique. Des humains plus ou moins intelligents en fonction de leur lieu de vie? Bôh, après tout, elle avait vu pas mal de bizarreries, une telle chose ne l'étonnait pas tellement.

Aniu eut un sourire confiant, avant de proposer qu'elles continuent à chercher un point d'eau. La lionne eut un très léger soupir, avant de suivre sa compagne de voyage, déjà partie en avant, bien qu'elle boitait légèrement, ainsi que le constata Vitani.
Elle se doutait bien que la blessure était sans vraiment de gravité, vu la quantité de sang qui coulait, mais il fallait quand même faire attention.
En fait, ce qui pourrait arriver de plus grave, selon elle - même si elle n'était certes pas une grande guérisseuse, elle avait quelques vagues connaissances en matière de blessures - serait une infection. Mais on n'en était pas là, heureusement! A priori, tant qu'Aniu nettoyait bien sa blessure...

Elle se mit à trotter allègrement, recherchant activement un endroit où boire. Elle aussi commençait à sentir la soif, surtout après une course haletante et tout ce stress. Heureusement qu'elles étaient sous les arbres, donc un peu protégées!

Au fur et à mesure qu'elle marchait, tentant d'utiliser ce qu'elle connaissait de son monde d'origine, elle sentit qu'elle se dirigeait dans la bonne direction.
Simple intuition, ou bien était la terre qui lui semblait très légèrement plus humide?
Elle en fut finalement certaine: elles y étaient presque! Elle accéléra encore le pas, pressée d'arriver à un cours d'eau.

-Je pense qu'on va bientôt pouvoir boire, lança-t-elle par dessus son épaule, pleine d'entrain.

En voyant la lionne la dépasser, Aniu décela un changement dans son odeur. Elle semblait avoir trouvée quelque chose, surtout lorsque l'on constatait que sa démarche était plus pressée et attentive. Cette assurance de la part de Vitani et le fait qu'elle se démène pour trouver un point d'eau montrait son implication. Son instinct de survie semblait plus développé encore que le sien. Et les quelques balafres observables sur son corps montrait que son enfance n'avait pas du être des plus tendres. Résultat d'une éducation à la dure? Ou bien des "trophées" de ses divers combats? Car oui, ça crevait les yeux qu'elle était une combattante. Des griffes aiguisées, un regard profond à faire froid dans le dos aux proies, elle se tenait fermement sur ses pattes pour ne pas se faire renverser... Que de détails révélant pourtant tellement de choses.

Le fait qu'elle prenne les devants était un argument de désir de vouloir mener le groupe, de s'occuper des autres et pas seulement de soi. L'estime de la louve remonta d'un cran.

Aniu, elle, marchait calmement mais avec célérité. Mais pas jusqu'à courir non plus, sa patte blessée risquerait de la faire chuter si elle allait trop vite. D'une allure régulière, elle suivit sa compagne lionne, veillant à toujours la garder en vue malgré qu'elle mettait de plus en plus de distance entre elles. Quelle motivation de sa part!!

_Attends!! Ne vas pas trop vite!!! Ma patte!! dit la louve, toujours en boitant.

Spoiler:

Pressée de trouver au plus vite le coin d'eau qu'elle était certaine d'avoir repéré non loin, elle en avait oublié la patte blessée - même si l'entaille n'était pas très gênante, c'était une plaie ouverte - d'Aniu, si bien que celle-ci dut le lui rappeler.

-Attends!! Ne va pas trop vite!!! Ma patte!!

Vitani se retourna et s'arrêta, un peu gênée d'avoir complètement oublié la blessure de la louve.

-Désolée. Je n'y pensais plus, s'excusa-t-elle en souriant d'un air légèrement embarrassé.

C'était étonnant, quand elle y repensait, puisque quelques mois à peine auparavant, elle aurait attendu, mais soupiré avec exaspération, comportement qu'elle avait acquis avec sa mère. Mais au contact du clan de Simba, son caractère s'était quelque peu adouci, d'où une meilleure considération envers les autres.

Dès que Aniu fut de nouveau à son niveau, elle repartit en avant, plus doucement toutefois.
Vitani constata assez vite et avec joie qu'elle ne s'était pas trompée: elles étaient arrivées à un cours d'eau, certes petit mais amplement suffisant pour que toutes deux se désaltèrent.

Elle se mit à laper rapidement, se rafraichissant et se détendant tout à la fois. Finalement, ayant bu tout son content, elle se coucha tout près en poussant un soupir de satisfaction. Qu'est-ce que ça faisait du bien!

Au moins avait-elle daignée l'attendre. Aniu avait connu des chefs de meute qui n'auraient même pas prit la peine de ralentir la cadence pour forcer les traînards à accélérer le mouvement, même si ils étaient blessés. Pour ce genre de guide, les faibles n'avaient qu'à partir, tandis que les autres devaient suivre le rythme qui leur était imposé. Elle se demanda si cela était également la règle dans le monde de la lionne. En fait, plus elle voyait sa compagne interagir, plus la louve était curieuse de voir à quoi son monde et ceux qui y étaient ressemblaient. Quelle était leur histoire? Et comment marchait leur hiérarchie? Comment le chef y était-il choisit, par la force, la sagesse, ou bien les liens du sang? Poser ce genre de questions pouvait se révéler gênant, elle s'en doutait, c'est pourquoi elle se retenait de les poser.

De toute façon, ses interrogations furent reléguées au second plan. Enfin de l'eau!! Elle ruisselait dans un petit creux. Cela faisait plus penser à un ruisseau qu'une rivière, mais c'était déjà un bon début. Histoire de se rafraîchir un bon coup, Aniu aurait été ravie de pouvoir plonger. Mais voilà, le niveau n'était pas assez bas pour cela. En contrepartie, après avoir laper pendant plusieurs minutes pour étancher sa soif devenue presque insatiable, la louve se roula partiellement dans l'eau. Même si elle n'était pas si fraîche que ça, c'était un énorme soulagement.

Suite à ce petit bain improvisé, et après s'être ébrouée en bonne et due forme, la louve alla rejoindre la lionne qui s'était couché non loin. Elle, pour sa part, alla se trouver un bon petit coin à l'ombre pour elle toute seule. Elles étaient toutes les deux séparées par quelques mètres de lumière et de chaleur étouffante. Au moins c'était plus supportable pour Aniu. Par contre, elle allait vite sécher. Mais ce n'était pas un problème en soi, avec la proximité du ruisseau. Surtout que le jour commençait à décliner. Le soleil passait derrière une mesa, éclipsant le rayonnement de l'astre. La nuit ne tarderait pas à tomber dans le coin.

_Vous pensez vous sentir motivée pour dormir sous la voûte étoilée? Pour ma part, ça ne me dérange pas

Elle grommela intérieurement. Encore cette saleté de vouvoiement qui s'obstinait. Même pour elle ça en devenait frustrant à force.

Vitani attendit tranquillement que la louve se rafraichisse, se sentant de plus en plus fatiguée. Le soleil qui se couchait l'incitait au repos, d'autant plus qu'après la folle course pour échapper aux humains, sous ce soleil cuisant, elle était exténuée.

A tel point que quand Aniu lui demanda si elle serait d'accord pour dormir à la belle étoile, elle n'hésita pas:

-Pourquoi cela me dérangerait-il? Ça ne peut me faire que du bien.

Elle ne pouvait s'empêcher de se sentir un peu vexée. Voulait-elle insinuer qu'elle ne pouvait pas dormir sans un abri au-dessus de sa tête? Si c'était le cas, elle se trompait.

-Par contre, il faut faire attention à ta blessure. Je veux dire, je sais que tu sais qu'il faut la désinfecter, mais n'oublie pas...

Vitani ne savait pas trop comment exprimer sa pensée sans risquer de vexer la louve. Oh, et puis au final, peu importait, elle ne disait rien de méchant!

Elle bailla et s'étira, repassant le déroulement du jour dans sa tête. Quelle journée elle avait eu! Changement de monde, nouvelle rencontre, découverte progressive l'une de l'autre, premier et terrifiant face-à-face avec les hommes...

Elle éprouva soudain une grande avidité, malgré sa fatigue, d'en savoir plus sur la louve.

-Tu veux bien me parler de ton monde d'origine? A quoi ressemble-t-il? Où es-tu née? As-tu vécu en communauté ou seulement avec ta famille proche?

Un torrent de questions se bousculaient dans la tête de la lionne, sans trop savoir par où commencer.

La réponse était claire et sans équivoque: ça ne la dérangeait pas le moins du monde. En fait, Aniu crut déceler un peu de frustration dans les paroles de la lionne. Elle semblait offensée. Pourtant, il n'y avait aucun sous-entendu lorsque la louve avait posée cette question. Elle désirait juste savoir si sa compagne tenait à avoir un petit confort, rien de plus.

Quant à sa blessure, pas de problème, elle allait vite cicatriser. Les armes des humains de son monde aurait fait bien plus de dégâts que cette éraflure légèrement profonde. Pas de quoi s'affoler.

_Oh, vous savez, je ne vais pas m'évanouir non plus... Fit elle sur un ton neutre.

Une fois cela dit, Aniu laissa tomber délicatement sa tête à même le sol. La fraîcheur commençait à se faire sentir de plus en plus, et elle se sentit de plus en plus dans une atmosphère qui lui convenait. Son épaisse fourrure lui pesait moins en terme de chaleur, c'était plus agréable. Elle se sentait prête à tomber dans un lourd sommeil réparateur, déjà ses paupières se fermaient lentement.

Sauf que Vitani ne semblait pas prête à aller dormir de son côté. Elle désirait obtenir plus d'informations, sa curiosité venait enfin de pleinement se révéler. Même si ce n'était pas vraiment le moment adéquat pour faire la discussion sur soi.

_Puisque vous semblez tant y tenir, eh bien je me dois de vous répondre... Elle bailla longuement, dévoilant ses rangées de crocs intimidants. ...Même si vous pouvez constater que je suis fatiguée! Alors, par où pourrais-je bien commencer...

*petit instant de réflexion*

_Eh bien... Je suis née dans une terre sauvage et peu accueillante que les humains appellent l'Alaska. C'est un endroit immense et énorme, presque entièrement recouvert de neige, et parsemé de montagnes éclatantes dont on croirait que les sommets ne sont pas loin de toucher le ciel. C'est quelque chose de magnifique à voir, surtout quand on à la chance d'apercevoir les aurores boréales... Je suis née dans une petite meute de loups, nous étions une dizaine en tout. Pour ce qui est des détails personnels... Je vous serais gré de ne pas m'en demander plus... Je sais que vous avez soif de curiosité, mais il vaut mieux que certaines choses restent enfouies... Me comprenez-vous? Elle l'interrogea du regard.

-Puisque vous semblez tant y tenir, eh bien je me dois de vous répondre... Même si vous pouvez constater que je suis fatiguée! Alors, par où pourrais-je bien commencer...

Vitani sentit une petite pointe de remords à ses paroles. Elle ferait sans doute mieux de laisser la louve se reposer. Elle ne savait pas vraiment pourquoi une dévorante curiosité l'avait prise à ce moment.

Mais quand Aniu commença à lui décrire sa terre d'origine, la lionne laissa de côté ses autres sentiments et écouta avec attention, avec toute la fascination d'un lionceau qui écoute les histoires racontées le soir par ses ainés.
La louve parla de "l'Alaska", territoire inhospitalier recouvert de neige et par endroits de montagnes, au sommets si hauts qu'ils semblaient atteindre la voute céleste.
Elle précisa que c'était un très beau spectacle, surtout si on pouvait voir des aurores boréales. A ces derniers mots, Vitani demeura perplexe. Encore quelque chose qu'elle ne connaissait pas. Elle pourrait sans doute demander à sa compagne de lui décrire ce que c'était...

Celle-ci lui dit ensuite qu'elle était née dans une meute de loups d'à peu près dix membres - c'était un peu comme son clan chez elle, apparemment, pensa la lionne, bien qu'avec la récente unification des Hors-la-loi et des lions du Rocher de la Fierté, ils étaient désormais bien plus nombreux.
A la pensée de son clan, elle fut prise d'angoisse. Comment allaient-ils? Avaient-ils remarqué l’absence de Vitani? Le temps s'écoulait-il différemment dans ce monde-ci par rapport à son monde d'origine? D'autres membres du clan étaient-ils tombés par accident dans un endroit qui leur était totalement inconnu?

Elle se força à ranger ses inquiétudes de côté. Elle n'y pouvait rien, de toute manière. Elle réorienta son attention sur Aniu, qui lui déclara qu'elle préférait ne pas trop parler de choses personnelles, car certaines choses devaient "rester enfouies". Étrange... Malgré sa curiosité mise à mal par cette volonté de la louve de garder tant de choses pour soi, Vitani devait reconnaitre que parfois, il valait mieux ne pas trop en savoir...

-Oui, je comprends, affirma-t-elle en réponse à la question de sa compagne, certaines choses doivent être gardées pour soi, après tout.

Elle médita quelques instants sur ces paroles. Dans sa vie, avait-elle vraiment des secrets, des choses qu'elle voulait ne confier à personne? Elle ne savait pas bien. Son existence avait toujours ou presque été régentée par Zira, pas grand-chose n'avait été de sa propre volonté, mis à part son choix de rejoindre le clan de Simba, et elle ne pensait pas avoir besoin de le cacher, ni par honte ni pour tout autre raison.

La réponse parut la satisfaire.

_Merci de me comprendre... Et quelque chose me dit que je ne suis pas la seule à garder des secrets en ce moment même, n'est-ce pas? Elle eut un petit regard perçant vers Vitani, puis se mit à sourire.

Tout le monde avait ses petites cachoteries à ne pas dévoiler. Et Aniu plus que quiconque. Elle qui vivait dans le secret le plus absolu après son errance désirée, ce n'est pas maintenant qu'elle se mettrait à tout dire à la première inconnue venue. Pour ça, il fallait le mériter. Même Balto n'avait pas su lui délier la langue, et c'était un des rares qui était vraiment capable de le faire. Même si elle devait avouer qu'elle s'était pas mal rapprochée de la lionne en si peu de temps. Elle n'était pas devenue asocial contrairement à ce qu'elle pensait. Sa solitude lui pesait vraiment finalement... Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait pas entretenue une relation si complice avec quelqu'un. Et pour ça, il lui aurait carrément fallu voyager dans un autre monde. C'était un peu vexant vu de cette manière.

Maintenant qu'Aniu venait un peu de parler de soi, eh bien c'était son tour d'en savoir plus sur sa compagne d'infortune.

Et vous alors? Pourrais-je en savoir plus sur votre personne? Que je sache au cas où si je me retrouve dans votre monde que je ne sois pas vraiment surprise de ce que je pourrais y trouver. Quitte à parler de soi, autant joindre l'utile à l'agréable.

-Merci de me comprendre... Et quelque chose me dit que je ne suis pas la seule à garder des secrets en ce moment même, n'est-ce pas?

Vitani eut un léger sourire.

-Oh, je n'ai pas grand-chose à cacher, en vérité...

Puis Aniu lui demanda si elle voulait bien parler d'elle, pour ne pas se retrouver totalement démunie si jamais elle tombait dans le monde de la lionne. Et si elle y tombait, pensa Vitani, elle aurait du mal à le supporter, avec la terre sèche et aride, l'eau et l'ombre rare.
Toutes deux ne pouvaient qu'espérer que la louve n'irait jamais sur la Terre des Lions, pour éviter les désagréments qu'elle endurait déjà alors que ce monde-ci était moins chaud que celui de Vitani!

-Chez moi... A ces deux simples mots, la lionne se trouva en proie à la nostalgie: elle aurait tant voulu y retourner! Elle se reprit cependant bien vite. Chez moi, il fait très chaud, ainsi que tu l'as compris, plus chaud même qu'ici. L'herbe est sèche, le sol brûlant, les coins d'ombres peu nombreux. Heureusement, il pleut quand même de temps en temps, tout juste assez pour permettre à la terre et aux plantes de vivre.

Elle inspira profondément; il lui semblait presque sentir le soleil la réchauffer, bien que là où elle se trouvait il fasse nuit.

-Je suis née en des temps troublés, en vérité. Ma mère s'appelait Zira; je n'ai jamais connu mon père. Tout ce que je sais, c'est que Scar, alors roi de la Terre des Lions, m'a adoptée, moi et mon frère Kovu. Mais très rapidement, Simba - le fils du prédécesseur de Scar, Mufasa - , que tout le monde pensait mort, est revenu et a pris la place de roi. Je ne sais rien du déroulement de cette affaire, ma mère m'a dit que Simba avait tué Scar, et elle m'a d'ailleurs enseigné à le haïr, ainsi qu'à mon frère Kovu.

Vitani se rendit soudain compte que son récit devait être difficile à suivre, tel qu'elle le racontait.

-Excuse-moi, je raconte n'importe comment, sans suivre aucune logique. Pour faire simple, on va dire que Scar est mort, et que Simba a banni ma mère, fidèle à Scar, et toutes les lionnes qui pensaient comme elle. Nous nous sommes installées sur les Terres Interdites, non loin de la Terre des Lions. Notre mère nous a donc appris à détester Simba, et a préparé un plan pour le renverser et installer Kovu comme roi.

Là, la lionne hésita. Fallait-il lui révéler en quoi consistait le plan de Zira? Oh, après tout, ces histoires étaient passées depuis un moment...

-Kovu devait infiltrer le clan de Simba en sauvant la fille du roi, Kiara, et prétendre vouloir ne plus rien avoir à faire avec les Hors-la-loi. Mais tout a raté quand Kovu est tombé amoureux de Kiara. A partir de là, notre demi-frère Nuka est... Sa gorge se serra à la pensée de son frère, qui avait perdu la vie en tentant de gagner l'admiration de leur mère. ...mort dans une embuscade contre le roi, nous avons lancé une attaque mais Kovu qui avait été banni par Simba quand il était revenu vers lui s'est interposé avec Kiara qui l'avait rejoint et... Son récit devenait erratique, peut-être aurait-elle dû refuser d'en parler? Maintenant, il était trop tard.
Elle prit une grande goulée d'air, avant de terminer en hâte son histoire.

-Et Kiara a réussi à faire comprendre à son père que cette guerre ne servait à rien, qu'on n'était pas si différents, et quand ma mère m'a dit de tuer Simba, j'ai refusé et j'ai rejoint son camp, mais même alors que toutes les autres lionnes la quittaient, elle ne voulait pas renoncer à la vengeance, elle a attaqué Simba mais Kiara s'est interposée, et elle est tombée dans le ravin, la rivière l'a emportée... elle termina sa phrase dans un murmure en regardant ses pattes. Et depuis, nous vivons tous au Rocher de la Fierté.

Elle avait fini. Son récit décousu et mal expliqué était terminé, elle allait pouvoir se calmer et après, elle dormirait.

Vitani se rendit soudain compte que la mort de Nuka et, oui, celle de sa mère l'avait laissée mise à mal, et que d'avoir tout dit, même n'importe comment, l'avait soulagée, comme si on venait de crever un abcès.
Ce n'était finalement pas si mal qu'elle ait pu parler...

Toute l'histoire venait de lui être contée aussi subitement qu'un coup de gourdin, avec les mêmes effets indésirables: un léger mal de crâne. Assimiler tant d'informations sur un monde inconnu aussi rapidement ça laissait quelques séquelles. Mais globalement, Aniu avait compris de quoi il en remontait, une histoire de vaste complot et d'infiltration d'un clan dans le but de prendre les terres de ce clan. Un petit jeu de pouvoir machiavélique et très courant. Il semblerait que le monde de Vitani ne soit pas non plus exempt de la tentation et de l'ivresse du pouvoir.

D'après le récit, la lionne avouait qu'elle se trouvait dans le mauvais camp (pas du point de vue vainqueur/vaincu, mais plutôt des raisons du conflit. A moins que quelques détails significatifs aient été omis) mais qu'elle l'a réalisé tout de même. Au moins cela montrait qu'elle avait une certaine morale, malgré la mort de son frère. Sa haine aurait très bien pu se retrouver amplifiée par cette perte, mais il semblait que ça n'ait pas été le cas. Pourtant, la perte d'un être cher avait de quoi sérieusement perturber, Aniu savait ce que ça faisait.

_Une histoire bien singulière que voici, et difficile à suivre avec ça... Mais au moins cela à le mérite de bien finir pour vous tous. Moi je n'ai pas eu cette chance d'une fin heureuse. Sur ce point là, je dois avouer que je vous envie. Mais votre existence a été menée par la haine envers une personne. Je suis surprise que malgré l'endoctrinement de cette "Zira", vous ayiez réussie à vous soustraire de l'influence qu'elle avait sur vous. Comme votre frère. C'est assez étrange... Elle sourit à Vitani. L'amour nous fait faire des choses assez incroyables on dirait...

La louve bailla la gueule grande ouverte. Elle était fatiguée, mais encore prête à répondre à de nouvelles questions. Pour elle, sa curiosité était assez satisfaite. Ducoup, elle s'en voulait un peu de ne pas dire plus de détails sur sa vie personnelle. Mais elle ne voulait pas que ça se sache, et qu'on le répète, et finalement, que Balto sache la vérité de la gueule d'un autre. Non, il fallait que ce soit elle qui lui dise, et personne d'autre...

Vitani souffla un bon coup. La plaie suppurante, sans être cicatrisée, était au moins nettoyée...

-Une histoire bien singulière que voici, et difficile à suivre avec ça... Mais au moins cela a le mérite de bien finir pour vous tous.

Bien finir, sauf pour Zira et Nuka, pensa aigrement la jeune lionne. Bien sûr, elle savait que jamais la paix n'aurait jamais été totalement établie si Zira était restée en vie, car jamais elle n'aurait accepté de déposer les armes face à Simba. Quant à Nuka, il serait resté fidèle à leur mère.
Sans doute toute cette histoire avait-elle finie aussi bien qu'elle l'aurait pu. N'empêche que Vitani avait l'impression que la louve cherchait à se plaindre comme si ses souffrances pouvaient augmenter son importance.

Elle soupira. Elle devait vraiment cesser de s'énerver pour rien. Elle le savait, elle devait s'efforcer de maîtriser son caractère emporté: sa mère le lui avait toujours dit. Mais parfois, c'était vraiment difficile!

La louve exprima son étonnement à l'idée qu'elle et son frère aient réussi à se dégager de l'emprise de leur mère, et déclara que l'amour était capable de beaucoup de choses.

-Sans doute, répondit laconiquement Vitani, songeant que l'amour n'avait rien eu à voir dans sa propre décision.
Elle vit qu'Aniu baillait largement.

-Voulez-vous dormir maintenant? proposa-t-elle. Elle avait parfois du mal à se montrer aussi obligeante, alors que toute sa vie elle n'avait montré de respect à personne, sauf à sa mère, qui pouvait être assez terrifiante quand elle le voulait. Mais elle le devait bien à la louve. Après tout, c'était de sa faute si sa compagne de voyage ne dormait pas en cet instant même, elle devait malgré elle le reconnaitre.

Elle sentait toujours une vague frustration, le sentiment qu'on l'avait laissée sur sa faim, à cause du récit tronqué d'Aniu, mais bon, elle n'allait pas en mourir! Après tout, si la louve voulait faire des secrets, c'était son choix...

Vitani semblait un peu gênée à l'allusion de "bien finir pour vous tous". Visiblement, elle n'était pas de cet avis, son regard perdu pendant quelques instants en témoignait. A quoi pouvait-elle bien penser en ce moment même? Après tout, elle a perdue des proches dans ce conflit, qui même si ils étaient dans le "mauvais camp" (si on pouvait le définir ainsi) restaient des proches. Les liens du sang étaient décidément incassables. Ce que la louve aurait aimée que ce soit le cas également pour elle. Mais de même que Vitani avait perdue des proches, Aniu en avait perdue elle aussi. Tout particulièrement l'un d'eux, qui ne pourrait sûrement jamais revenir, même si il était bel et bien vivant.

Se lamenter en pleurant sur son sort était inutile et une perte de temps.

_Dormir serait une bonne idée, en effet. Mais ce n'est pas ce genre de fatigue que je ressens actuellement. Certes, j'ai envie de me reposer, mais il n'y a pas que ça... Elle se tourne vers sa compagne d'infortune, avec un sourire timide. Dormez si vous le voulez. Moi, je vais réfléchir à tout ce qui m'arrive depuis ces voyages. Et puis je vais en profiter pour repasser un coup d'eau sur ma blessure.

Elle se relève doucement, et se dirige tranquillement vers le ruisseau. Elle avait beaucoup moins mal à sa blessure, et elle ne boitait presque plus. Mais la plaie n'était toujours pas correctement refermée, elle devait être humidifiée, et le gosier d'Aniu était sec. Elle en profita donc pour se désaltérer une nouvelle fois.

Aniu resta silencieuse un moment, avant de dire qu'elle était en effet fatiguée, mais pas de la fatigue qui partait en dormant.
Quoi? Quelle fatigue, alors? Vitani ne comprenait pas.
La louve lui sourit doucement et lui proposa de dormir, pendant qu'elle réfléchirait à ce qui lui arrivait depuis le début des étranges voyages.

Mais de quoi elle parle? La lionne allait finir par se demander si Aniu savait s'exprimer clairement ou non. Peut-être voulait-elle simplement être seule.
Si c'était le cas, Vitani était toute disposée à le lui accorder: elle commençait à être sérieusement fatiguée, elle s'en rendait soudain compte.

La louve alla remettre de l'eau sur sa blessure, sous l’œil de moins en moins attentif de Vitani, la tête posée sur les pattes. Par ses paupières à peine entrouvertes, elle posa le regard sur ses pattes, sur ses griffes aiguisées. Au final, n'était-elle pas ce que sa mère avait fait d'elle?
Mais depuis peu, elle avait repris le contrôle de sa vie. Comme l'avait dit la louve blanche, elle s'était libérée de l'emprise de Zira. Même si elle se sentait toujours en partie coupable de la mort de sa mère, et regrettait que cela ait été nécessaire pour que la paix revienne, elle pourrait faire ce qui lui plairait.

Ah, la sensation grisante de liberté! Dans ce genre de moments, elle se soustrayait à la douleur que lui causait la mort de Nuka et de sa mère. Elle savait qu'une fois qu'elle aurait fait son deuil, elle se sentirait mieux. Bien sûr, cela prendrait du temps, mais...

Elle reporta son attention, de plus en plus vacillante, sur Aniu. Elle avait sous-entendu avoir perdu des êtres chers... Qui étaient-ils? Mais Vitani avait l'esprit trop embrumé pour se pencher sérieusement sur la question, elle avait toujours plus de mal à réfléchir, au fur et à mesure que la fatigue grandissait.
Renonçant à lutter, elle se laissa glisser dans le sommeil, après avoir marmonné un vague «bonne nuit» à la louve.